06/02/12

Accord de gouvernement et note de politique générale – Les perspectives de la législature en matière de soins de santé

Aperçu de l’accord de gouvernement et de la note de politique générale en matière de soins de santé

Le refrain est connu : la législature sera celle de l’application des accords communautaires (A) et de la rigueur budgétaire (B) : la politique en matière de soins de santé (C) en est une parfaite illustration.

Un bref aperçu…

A. ACCORDS COMMUNAUTAIRES

1. le transfert de matières –réformes institutionnelles

En matière de financement des soins de santé.

- Le fédéral reste le garant de la « solidarité interpersonnelle » en ce qu’il garde la tutelle sur l’INAMI.

En matière de politique hospitalière :

- Les normes d’agrément sont à présent communautarisées (les normes de programmation restent fédérales) ;
- Le BMF des hôpitaux reste fédéral à l’exception (notoire) des sous-parties A 1 et A 3 (gros investissements et financement de l’appareillage médical lourd)

En matière de politique des personnes âgées et soins long care

- La politique en matière de MR-MRS, centres de soins de jour, centres de crourts séjours, services G isolés et services Sp isolés est entièrement communautarisée (en ce compris en ce qui concerne la fixation du prix réclamé aux résidents)
- Bon nombre de conventions de revalidation ressortent par ailleurs à présent de la compétence communautaire.

En matière de politique « soins de santé mentale »

- La compétence complète en matière de maisons de repos psychiatriques (MSP) et d’initiatives d’habitation protégée est transférée aux communautés, de même que les plateformes de santé mentale.

En matière de « professions de soins de santé ».

- Les prestataires de soins seront agréés par les entités fédérées. Les conditions d’agrément restent toutefois de la compétence du fédéral.
- La définition des « sous-quotas » dans le cadre du contingentement est transférée aux communautés.

2. Le transfert de budget – loi de financement

4,2 milliards d’euros de compétences homogènes seront transférés aux communautés dans le cadre de la politique des soins de santé et de l’aide aux personnes.

Les modalités de ce transfert ne sont pas autrement étayées dans l’accord de gouvernement. Notons toutefois qu’en ce qui concerne les sous-parties A 1 et A 3 du BMF des hôpitaux : une dotation annuelle sera prévue dans la loi de financement. Cette dotation sera composée de deux parties :
- Une partie extinctive, calculée chaque année en fonction des engagements déjà pris (33 ans)
- Un montant « à convenir » pour les nouveaux investissements qui seront consentis dans le futur.
Il nous faut espérer que ces clés de répartition pourront être rapidement déterminées aux fins de permettre effectivement de réfléchir utilement aux investissements futurs à consentir pour la rénovation et le renouvellement du parc hospitalier et de son appareillage de pointe.

3. le transfert de compétences – accords de concertation

On pouvait s’en douter, lorsque les compétences respectives des divers niveaux de pouvoirs sont ainsi « imbriquées », il faut nécessairement ajouter de l’huile dans les rouages.

Ceci se matérialise à divers égards.

En ce qui concerne spécifiquement Bruxelles, on adopte une solution sui generis, en décrétant que, dans la mesure où les compétences impliquent, pour les personnes, des obligations ou des droits à une intervention ou une allocation, ou lorsqu’il s’agit d’institutions bicommunautaires, l’autorité compétente, en matière de soins de santé et d’aides aux personnes, la COCOM.

En ce qui concerne l’ensemble du territoire, l’accord de gouvernement prévoit, d’une part, la mise en place d’une « institution de concertation » spécifiquement dédiée à accorder les violons des diverses entités (fédérales et fédérées) et, d’autre part, un certain nombre de matière à propos desquelles il y aura lieu de conclure des accords de coopération.

Retenons que ces matières sont assez essentielles, cela concerne :

- la gestion et l’utilisation d’eHealth ;
- les modalités de respect des engagements internationaux ;
- les modalités de contingentement des métiers de santé (l’accord de gouvernement prévoit toutefois la suppression du contingentement pour les kinés)
- l’organisation de la concertation sociale sur les accords sociaux pour les métiers de la santé ;
- mode de gestion et de financement du KCE

Notons en outre que l’institut de concertation à créer reprendra les missions importantes du centre du cancer.

Gageons que ces accords de coopération ne resteront pas lettres mortes, ou, à tout le moins, que leur absence ne paralyse pas la mise en œuvre des politiques importantes qu’ils sont amenés à couvrir.

B. LA RIGUEUR BUDGÉTAIRE

1. les mesures de diminution

Le contexte de rigueur budgétaire apporte, forcément, son lot de mauvaises nouvelles.

La note de politique générale prévoit ainsi des économies structurelles dans les honoraires médicaux. A ces économies s’ajoutent le fait que les honoraires ne connaîtront, sous réserve, qu’une indexation partielle (1,577 %).

Un élément peut-être passé assez inaperçu mais toutefois de prime importance à cet égard : l’accord de gouvernement entend interdire les suppléments d’honoraires pour les chambres à deux lits.

Des économies complémentaires seront réalisées dans les médicaments (mais dans une mesure inférieure aux économies de certaines années précédentes), notamment par le rabaissement automatique de leur prix, et par une diminution des volumes prescrits à la suite d’un accroissement des contrôles par les organismes assureurs. Diverses mesures sont prévues également relatives à la prescription DCI, en vue de réduire les dépenses.

Le secteur hospitalier est également touché, en particulier en ce qui concerne le financement de l’appareillage médical lourd et en ce qui concerne le financement de la sous-partie B 4.

D’autres mesures ont trait au financement des implants et à la forfaitarisation du petit matériel chirurgical à l’hôpital.

2. les mesures de responsabilisation

La politique de responsabilisation des acteurs de soins, soutenues par les rapports de la cour des comptes, sera en outre approfondie.

En ce qui concerne les hôpitaux, la note de politique générale prévoit une extension substantielle de l’application du régime des montants de référence (on parle ainsi de l’étendre notamment à l’hospitalisation de jours).

De nouvelles mesures de responsabilisation devraient par ailleurs être mises en place pour les mutuelles.

C. POLITIQUE GÉNÉRALE

Les mesures budgétaires et les accords communautaires, même s’ils font largement ombre, ne doivent pas occulter le projet politique qui sous-tend la législature en matière de soins de santé.

Quelques projets sont avancés.

En vrac (et de manière non-exhaustive) :

- Approfondissement de la politique des « profils de prescription » ;
- Intensification de l’utilisation des contrats prix-volume en matière de médicaments et de produits de santé ;
- Augmentation de la forfaitarisation des médicaments à l’hôpital ;
- Mise en place d’une « plateforme de concertation multidisciplinaire « recherche et développement (bio)pharmaceutique » entre le gouvernement et l’industrie pharmaceutique ;
- Volonté de revoir l’organisation des relations juridiques entre gestionnaires d’hôpitaux et médecins hospitaliers ;
- Volonté d’assimiler largement les politiques des prix applicables en matière de médicaments, aux dispositifs médicaux et appareils auditifs ;
- Suppression du contingentement pour les kinésithérapeutes ;
- Adoption d’un arrêté royal relatif aux biobanques ;
- Renforcement des soins de première ligne et des médecins généralistes, notamment par une meilleure prise en charge de l’acte intellectuel ;
- Modification des règles légales en matière d’assurance hospitalisation, notamment par rapport aux règles d’exclusions.

Notre pays se situe dans la moyenne européenne au point de vue de l’incidence des soins de santé sur le PIB (10,2%). Dans le même temps, il présente l’indice de satisfaction le plus élevé.

Cela vaut bien quelques sacrifices sans doute…. Espérons que ce soient les bons.

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