20/06/13

La Belgique attire à nouveau le capital-investissement

Pas moins de 42 millions d'euros ont été investis dans des entreprises belges en plein essor en 2013

La Belgique est redevenue un marché attractif pour les investisseurs. L'année 2013 a démarré sous des auspices favorables et l'heure est donc à l'optimisme, bien qu'une certaine prudence s'impose. Les activités de capital-investissement concernent principalement le secteur de la santé, les biosciences, la technologie et les technologies de l'information, ainsi que l'énergie et les services de distribution. Telle est l'une des tendances qui ressortent d'une étude menée par le cabinet d'avocats NautaDutilh auprès de 57 professionnels du capital-investissement et du capital-risque.

NautaDutilh, l'un des plus grands cabinets d'avocats indépendants au Benelux, spécialisé dans le droit des entreprises et des banques, a interrogé 57 professionnels du capital-investissement et du capital-risque sur la situation de leur secteur. La moitié d'entre eux a déclaré que le marché belge attirait de nouveau le capital-investissement et le capital-risque, ce qui constitue la conclusion la plus marquante du rapport.

Les entreprises familiales vendent

Les professionnels interrogés prévoient surtout des opérations à hauteur de dix à cinquante millions d'euros. Par ailleurs, les acheteurs les plus actifs seront les grandes entreprises, suivies par les sponsors et les sociétés de capital-investissement et de capital-risque.

Selon 51 pour cent des professionnels interrogés, les entreprises familiales seront les principaux vendeurs. « Lorsque des sociétés familiales cherchent un acheteur, elles préfèrent opter pour un entrepreneur stratégique plutôt que pour une société de capital-investissement », explique Elke Janssens, partner corporate et M&A chez NautaDutilh. « Ces entrepreneurs considèrent leur entreprise comme leur bébé. Ce n'est pas le prix qui est l'élément prépondérant dans leur décision de vendre, mais l'avenir de leur entreprise et de leur personnel. C'est pourquoi ils sont parfois moins enclins à vendre leur entreprise à des sociétés de capital-investissement, qui vont professionnaliser l'entreprise de manière rationnelle afin de la revendre quelques années plus tard. »

À l'heure actuelle, les activités sur le marché du capital-investissement sont surtout dopées par les conditions macro-économiques, la confiance des investisseurs et les restructurations opérées par les institutions financières. « Les entreprises qui ne se sont pas encore relevées depuis la crise de 2008 ont atterri au département des soins intensifs des banques », explique Sophie Jacmain, partner distressed M&A chez NautaDutilh. « Au début de la crise, les banques intervenaient encore peu dans la restructuration de l'entreprise, mais les choses ont changé. Les banques contraignent les entreprises en difficulté à vendre leurs actifs, ce qui attire les sociétés de capital-investissement. »

Les secteurs automobile et financier moins attractifs

Les professionnels interrogés prévoient principalement des activités de capital-investissement dans le secteur de la santé, les biosciences, la technologie et l'IT, ainsi que l'énergie et les services de distribution. En outre, ils remarquent que les fonds de capital-investissement investissent de plus en plus souvent dans des maisons de repos dans le secteur de la santé.

Néanmoins, le secteur de la santé présente également quelques pièges et obstacles. À partir du 1er juillet 2013, tous les prestataires de soins bénéficiant de subventions - dans la pratique, 99,9 % des hôpitaux belges - seront soumis à l'obligation de passer par des marchés publics. Par ailleurs, la plupart des acteurs de ce secteur sont des organisations non marchandes qui ne peuvent distribuer des bénéfices.

Dans le domaine des biosciences, la Belgique est même le numéro un du capital-investissement au niveau européen. À l'échelle européenne, un tiers des investissements dans la biotechnologie visent le marché belge.

Selon les prévisions des personnes interrogées, les secteurs automobile et financier génèreront le moins d'opérations de capital-investissement. Bien qu'il existe des possibilités dans le secteur financier, il est probable que la législation et l'influence politique dissuadent les investisseurs de s'aventurer sur ce marché.

Peur du risque ?

Depuis la crise de 2008, les acteurs du marché ont davantage tendance à éviter les risques lorsqu'ils envisagent de fusionner ou de racheter des entreprises, ce qui influence également la manière dont les fusions et rachats sont préparés et mis en œuvre. Dès lors, 77 % des professionnels interrogés affirment que la diligence raisonnable, autrement dit une radiographie de l'entreprise, doit permettre de déceler les éventuels problèmes.

Or, le cabinet NautaDutilh a appris par expérience que ce système de diligence raisonnable n'est pas aussi populaire dans la pratique. « Il s'agit d'une procédure coûteuse, et nous constatons que les acheteurs y ont de moins en moins recours. Ce n'est que lorsque l'acheteur se retrouve dernier en lice qu'il demande une analyse approfondie. »

Les acteurs belges sous-estiment l'impact de la nouvelle réglementation

Le mois prochain (22 juillet 2013), plusieurs nouvelles mesures européennes entreront en vigueur : la directive sur les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs (AIFMD) et le règlement relatif aux fonds de capital-risque européens (VCR). Ces mesures prévoient que les fonds non cotés devront désormais aussi se plier à des règles strictes en matière de rapports annuels et de transparence.

Les pouvoirs publics et de nombreux fonds de capital-investissement belges ont sous-estimé l'impact de ces mesures et tardent trop à commencer à appliquer la nouvelle réglementation. 72 % des professionnels interrogés déclarent avoir peu connaissance des nouvelles règles, voire pas du tout.

Dimension fiscale

Résultat étonnant : la (nouvelle) règle fiscale anti-abus et les modifications continues apportées à la déduction de l'intérêt notionnel ne figurent pas parmi les principales préoccupations des professionnels interrogés. Au contraire, ces derniers s'inquiètent surtout de l'impôt sur la plus-value des actions pour les actionnaires de sociétés, instauré récemment, et de l'absence de consolidation fiscale.

« Ce dernier résultat ne m'étonne pas », déclare Pascal Faes, Partner Tax chez NautaDutilh. « Pour imputer les frais de financement au niveau de la société constituée afin de procéder à l'opération d'acquisition sur les bénéfices d'exploitation de la société visée, il est nécessaire, à défaut d'un régime de consolidation fiscale (en vertu duquel la société spécialement créée en vue de procéder à l'acquisition et la société visée peuvent être considérées comme un seul contribuable), de trouver une bouffée d'oxygène en mettant en place des mécanismes de debt push-down, parfois très complexes. Il convient d'ailleurs de se demander quel serait l'impact de la nouvelle règle anti-abus sur ces mécanismes. » Enfin, les professionnels interrogés citent également une diminution générale du taux d'impôt des sociétés parmi les priorités.

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