21/03/24

Un bail à ferme écrit est-ce nécessaire et si oui, à quelles conditions doit-il répondre ?

Après plus de 50 ans de loi sur le bail à ferme, la Flandre dispose depuis le premier novembre 2023 d'un nouveau décret sur le bail à ferme.

Jusqu'à présent, l’on ne concluait pas souvent un bail à ferme écrit car, dans la pratique, cela n'affectait pas la validité du bail lui-même. 

Vous trouverez dans l'article ci-dessous comment cela a été abordé dans le nouveau décret sur le bail à ferme. 

1. Un bail écrit est-il obligatoire ? 

Sous le régime de la loi sur le bail à ferme, il arrivait souvent qu'un contrat de bail écrit ne soit pas conclu, ce qui entraînait une grande insécurité juridique pour les preneurs et les bailleurs. Par conséquent, il y avait beaucoup d'ambiguïté autour de la question de savoir si des baux étaient encore conclus, à qui ils étaient conclus, pour quelle durée, etc. 

La loi sur le bail à ferme prévoit l'obligation de fixer le bail par écrit. Mais l'absence d'écrit n'affectait pas la validité du bail. Un bail oral était donc possible. 

En revanche, le nouveau décret sur le bail à ferme prévoit qu'un accord écrit est obligatoire. 

Pour des raisons de sécurité juridique, chaque convention doit mentionner expressément les informations minimales suivantes : 

1° l'identité de toutes les parties contractantes 

Pour les personnes physiques, il s'agit du prénom, du nom de famille, du domicile, du numéro d'identification dans le Registre national ou dans le registre BIS de la Banque-Carrefour de la Sécurité sociale et, si ces données ne sont pas connues, la date et le lieu de naissance sont indiqués. 
 
Pour les personnes morales, il s'agit de la dénomination sociale et du siège social, du numéro d'entreprise et de l'identité des personnes habilitées à représenter la personne morale ;

2° la date de début du bail ;
 
3° la durée du bail ;

4° la désignation cadastrale des parcelles, qui figure dans l'extrait du registre cadastral et qui indique au moins la commune dans laquelle les parcelles sont situées, la division, la section, le numéro de parcelle ;

5° le revenu cadastral non indexé de chaque parcelle, ainsi que la région agricole dans laquelle se trouve chaque parcelle ;

6° le fermage, dont le maximum a été fixé conformément au chapiter 6 du présent décret sur les baux ;
 
7° le mode de paiement du fermage et, le cas échéant, le numéro de compte sur lequel le fermage doit être réglé.

En revanche, un bail à ferme est juridiquement valable lorsque l'absence de bail écrit est due au refus du bailleur de rédiger un bail écrit. Le Parlement flamand a ainsi voulu éviter que le preneur soit victime du comportement du bailleur. 

2. Le décret sur le bail à ferme prévoit des sanctions

En cas de refus d'une des parties, la partie la plus diligente peut obtenir un document écrit par l'intermédiaire de la Justice de Paix, nous y reviendrons.

Chaque partie a la possibilité de saisir le tribunal si l'autre partie refuse de rédiger un bail écrit. Cette possibilité s'applique tant aux baux à ferme existants qu'aux nouveaux baux à ferme.

Le décret sur le bail à ferme introduit également un mécanisme de sanction pour la partie qui refuse de coopérer à la rédaction d’un contrat écrit.

Si le bailleur refuse d'établir un contrat écrit et que la demande du preneur est acceptée, le bail sera renouvelé à la date à laquelle le jugement devient définitif, quelle que soit la date d'entrée en vigueur du bail. Il existe dans ce cas une présomption irréfragable en faveur du locataire, que le bail ait ou non commencé plus tôt. Cela implique donc qu'un contrat de bail existe entre les parties et qu'il a été prouvé.

Si le preneur refuse d'établir un contrat écrit, le bailleur peut demander la résolution du contrat.
 
La sanction ne s'applique au locataire ou au bailleur récalcitrant que si le refus est maintenu jusqu'à ce que l’affaire soit prise en délibéré. Les parties peuvent donc encore parvenir à un accord, par exemple au cours de la procédure de conciliation ou même au cours de la procédure de fond. Dans ce cas, la sanction ne s'applique donc pas. 

3. Preuve par le preneur

Si aucune convention écrit n'a été établie, le preneur peut apporter la preuve de l'existence d'un bail et de ces conditions par tous les moyens, témoins et présomptions compris. 

En outre, le preneur peut prouver l'existence d'un bail en produisant la preuve d'offre personnelle de paiement du fermage, à laquelle le bailleur n'a pas réagi, par une convocation en conciliation devant le tribunal compétent, dans un délai de six mois à compter de l'offre. L'offre doit être confirmée dans les 15 jours par un envoi mentionnant l'existence d'un bail, ainsi que l'année et la parcelle sur lesquelles porte le paiement.

4. Quelles sont les étapes à suivre en pratique ?

  • Etape 1 : vous demandez à votre cocontractant d'établir, compléter et/ou de signer le bail par écrit ;
  • Étape 2 : en cas de refus ou d'échec, vous envoyez une mise en demeure indiquant les sanctions qu'il/elle risque ;
  • Étape 3 : si cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, il faut saisir le tribunal. 

5. Que faire en cas de discussion sur les modalités ? 

Si la discussion ne porte pas sur la question de la rédaction d'une convention écrite, mais plutôt sur son contenu, les sanctions mentionnées ne s'appliqueront pas. 

En effet, il peut arriver qu'alors que les parties conviennent de l'existence d'un bail à ferme et qu'elles souhaitent également établir la convention par écrit, il y ait une discussion sur les modalités ou l'inclusion de certaines clauses. 

De plus, comme certaines clauses et modalités sont nouvelles, le tribunal pourra facilement régler de nombreux litiges à cet égard en se basant sur la date d'entrée en vigueur du bail. En effet, si le bail est antérieur au décret sur le bail à ferme, nombre de ces clauses n'auraient jamais pu être convenues lors de la conclusion du contrat, tout simplement parce qu'elles n'existaient pas à l'époque. 

Il ressort clairement de la préparation parlementaire qu'une discussion sur les modalités ne donne pas droit à une sanction.

6. La durée minimale du bail

La loi sur le bail à ferme stipule que le bail ne peut être inférieur à neuf ans et qu'il est automatiquement renouvelé pour neuf ans si aucun préavis de résiliation valable n'a été donné avant la fin de la période en cours, même si la période d'utilisation initiale dépasse neuf ans. Si une durée plus courte avait été stipulée, la durée du bail était automatiquement portée à neuf ans.  

Ces dispositions sont reproduites dans le décret sur le bail à ferme.

Quelle que soit la durée du bail et nonobstant toute convention contraire, le locataire peut à tout moment résilier la totalité ou partie du bail moyennant un préavis d'au moins un an.

Les parties peuvent mettre fin au bail en cours à condition que leur accord soit constaté dans un acte authentique ou dans une déclaration faite devant le juge après interrogatoire.

En outre, le décret sur le bail est également rendu applicable aux conventions établissant un bail emphytéotique d'une durée inférieure à 27 ans. Il s'agit d'éviter que l'application du décret flamand sur le bail ne soit érodée par l'utilisation abusive de la figure du bail emphytéotique.
C'est le résultat des modifications apportées en 2021 au Livre 3 sur les Biens du Code civil, notamment en ce qui la figure du bail emphytéotique . La durée minimale a ainsi été ramenée de 27 à 15 ans, ce qui en fait une alternative intéressante au bail à ferme ordinaire. Cette modification aurait été motivée par le fait que la durée de 27 ans s'avérait trop longue pour certaines constructions immobilières.


Charlotte Sterckx
Ulrike Beuselinck

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