12/12/23

Accord budgétaire fédéral: quelles conséquences pour le secteur immobilier?

Le 9 octobre 2023, le gouvernement fédéral a conclu un accord budgétaire (l'Accord budgétaire), contenant un certain nombre de mesures qui ont un impact significatif pour le secteur immobilier. Nous avons le plaisir de vous informer des changements les plus importants dans cet article.

Démolition et reconstruction: la règle des 6 % de tva disparaît

  • Actuellement, un taux de TVA réduit exceptionnel est en vigueur en Belgique pour la démolition et la reconstruction de bâtiments sur une double base[1] :
    • d'une part, un régime préférentiel permanent de 6 % de TVA pour la démolition et la reconstruction dans 32 « zones urbaines » [2] a été mis en place depuis 2007 dans le but de lutter contre la dégradation urbaine. Les conditions suivantes s'appliquent pour bénéficier de ce régime préférentiel: 
      • les actes doivent concerner un logement qui, après l'achèvement des travaux, est utilisé exclusivement ou principalement comme logement privé ;
      • la propriété reconstruite doit être située dans l'une des zones urbaines ;
      • les actes doivent être fournis et facturés par une personne enregistrée comme « entrepreneur indépendant » au moment de la conclusion du contrat d'entreprise [3] ; et
      • le maître d'ouvrage doit introduire une déclaration préalable auprès d'un bureau de contrôle du SPF Finances et fournir une copie de la déclaration au prestataire de services. [4]
  • d'autre part, une réduction temporaire générale du taux de TVA à 6 % a été introduite le 1er janvier 2021 pour la démolition et la reconstruction de bâtiments si les « conditions sociales » suivantes sont remplies :  
    • le maître d'ouvrage-personne physique utilise le logement reconstruit comme son « comme habitation unique et à titre principal comme habitation propre» où il se domiciliera sans délai ;
    • le logement a une surface habitable ne dépassant pas 200 m². [5]

Il convient de mentionner que les deux conditions doivent rester remplies au moins jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant l'année de la première occupation ou de la première utilisation du bien. [6]

Dans son Accord budgétaire, le gouvernement a décidé de ne pas prolonger la réduction temporaire susmentionnée à partir du 1er janvier 2024 et de rendre le régime préférentiel pour les zones urbaines, sous réserve du respect des conditions sociales, applicable de manière permanente à l'ensemble du territoire belge.

Concrètement, cela signifie que le gouvernement s'engage pleinement à garantir l'accessibilité financière des logements familiaux pour les jeunes familles. Le revers de la médaille est que les promoteurs immobiliers  sont à nouveau confrontés à l'ancien régime de TVA, car le champ d'application de la prorogation temporaire ne vise que les maîtres d'ouvrage-personnes physiques. Cela exclut un acteur important du marché immobilier du champ d'application de ce régime préférentiel.

En effet, la TVA due sur les projets de construction réalisés par les promoteurs immobiliers et destinés à la vente passera de 6 % à 21 %. Cette augmentation significative impliquera une économie pour le budget fédéral, mais les promoteurs de construction et, par extension, l'accessibilité financière de ces logements subiront les effets négatifs de cette mesure.

Toutefois, le gouvernement a décidé de prévoir deux mesures transitoires:

  • Mesure transitoire générale : Pour les projets de construction existants, l'Accord budgétaire prévoit un régime transitoire pour l'ensemble du territoire belge jusqu'au 31 décembre 2024. Les particuliers qui ont acheté un logement par l'intermédiaire d'un promoteur immobilier continueront à bénéficier de la règle des 6 % de TVA à condition que le permis unique (reconstruction) ait été demandé avant le 1er juillet 2023 et que les travaux de démolition et de reconstruction soient facturés au plus tard le 31 décembre 2024.
  • Mesure transitoire concernant les zones urbaines : Une mesure transitoire serait également prévue pour les projets de construction qui ne répondent pas aux conditions sociales susmentionnées, mais qui pourraient bénéficier du régime préférentiel accordé aux zones urbaines dans le passé. Ici aussi, le gouvernement opterait pour la double condition (i) de l'introduction en temps utile de la demande de permis d'environnement avant le 1er janvier 2024, et (ii) de la facturation et du paiement de tous les travaux en 2024. 

Toutefois, il reste à voir comment ces mesures transitoires seront concrètement mises en œuvre. 

Taux de tva sur les pompes à chaleur, les panneaux et les chauffe-eau solaires

Jusqu'au 31 décembre 2023, il est possible de bénéficier d'un taux de TVA réduit de 6 % pour l'installation de pompes à chaleur, de panneaux et de chauffe-eau solaires pour les habitations de moins de 10 ans. [7]

Le gouvernement a décidé de prolonger indéfiniment ce régime de faveur uniquement pour les pompes à chaleur (pour les habitations de moins de 10 ans).

Cela signifie donc qu'à partir du 1er janvier 2024, le taux de TVA pour les panneaux et les chauffe-eau solaires (pour les habitations de moins de 10 ans) repassera à 21%.  

Pour les habitations de plus de 10 ans, rien ne change en ce qui concerne l'installation de pompes à chaleur, de panneaux et de chauffe-eau solaires, et le taux de TVA de 6 % reste inchangé.

Droits d'enregistrement pour les droits d'emphytéose et les droits de superficie: de 2 à 5 pour cent

Une décision qui reste quelque peu sous le radar, mais qui est pourtant d'une importance fondamentale pour le secteur immobilier, est l'augmentation du droit d'enregistrement proportionnel pour le droit d'emphytéose et le droit de superficie. En effet, à partir du 1er janvier 2024, le droit d'enregistrement pour les contrats de constitution d'un droit d'emphytéose ou d'un droit de superficie et pour leur transfert passera de 2 % à 5 %. Il va de soi que cette augmentation de 3% aura certaines répercussions dans le cadre de constructions immobilières spécifiques (par exemple, constitution d'un droit de superficie en faveur d'un promoteur).

Renforcement des conditions de détention des fonds d'investissement immobilier

Enfin, certaines mesures ont également été prises pour lutter contre l'évasion et la fraude fiscales. Entre autres, outre le renforcement et le durcissement de la taxe Caïman, il y aura également un durcissement des conditions de détention d'un fonds d'investissement immobilier afin de combler la faille fiscale qui permet à ces fonds d'être détenus pendant une très courte période afin de bénéficier de certains avantages fiscaux. Concrètement, le gouvernement souhaite introduire une période de standstill de cinq ans pour les fonds d'investissement immobiliers spécialisés.

L'accord budgétaire doit encore être transposé dans la législation. Lydian vous tiendra bien entendu au courant de l'évolution de ce dossier.

[1] La présente contribution n'aborde pas les régimes de faveur spécifiques concernant (i) la démolition et la reconstruction et la location à des bailleurs sociaux et (ii) la rénovation de logements de plus de 10 ans. 

[2] Les centres urbains sont : Anvers, Charleroi, Gand, Ostende, Malines, Mons, La Louvière, Saint-Nicolas, Seraing, Liège, Bruxelles, Anderlecht, Saint-Gilles, Saint-Joostten-Node, Saint-Jans-Molenbeek, Schaerbeek, Forest, Louvain, Bruges, Courtrai, Roulers, Alost, Termonde, Genk, Hasselt, Mouscron, Tournai, Verviers, Namur, Ixelles, Uccle et Etterbeek. 

[3] Il s'agit d'un entrepreneur au sens des articles 400 et 401 CIR 92.

[4] Circulaire n° AFZ 3/2007 du 15 février 2007, n° 80.

[5] Voir Circulaire 2021/C/18 du 25 février 2021 relative au taux réduit de la TVA applicable temporairement concernant la démolition et la reconstruction de bâtiments d'habitation sur l'ensemble du territoire belge et leur livraison.

[6] Article 1quater, § 4, de l’Arrêté royal n° 20.

[7] Y compris les logements reconstruits après démolition ou les logements nouvellement construits.

Iris Hemelaer
Dario Petosa
Bruno Stroobants
Kyoto Van Herreweghe
Anne-Victoire Vandekerckhove

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