19/07/16

Motif grave: censure du principe de proportionnalité

Le motif grave est défini à l’article 35, al. 2, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail comme étant “toute faute grave qui rend immédiatement et définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre l’employeur et le travailleur”.

Une certaine jurisprudence apprécie l’existence d’un lien de causalité entre la gravité de la faute et l’impossibilité de la collaboration professionnelle qui doit en découler par la perte de confiance que l’intensité de la faute commise engendre dans le chef de l’autre partie. Il s’agit du principe de proportionnalité prôné par une partie de la doctrine.

La Cour de cassation vient de rendre un arrêt important en la matière.

Dans l’affaire soumise à la censure de la Cour de cassation, une travailleuse dans le secteur de la grande distribution avait détourné à son profit des points bonus destinés aux clients.

Tant le tribunal du travail que la Cour du travail vont considérer ce fait comme une faute grave, mais vont estimer que l’ancienneté (22 ans) et  l’absence de faute antérieure rendent la sanction disproportionnée. Ce faisant, les juridictions du travail ont fait application du principe de proportionnalité précité.

La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour du travail de Liège en ces termes: “En liant l’appréciation de la possibilité de poursuivre les relations professionnelles malgré la faute grave commise par la défenderesse, qui constitue le critère légal de la notion de motif grave, au critère, qui lui est étranger, de la disproportion entre cette faute et la perte de son emploi, l’arrêt viole l’article 35, al. 2 de la loi du 3 juillet 1978.”

Les termes clairs de cet arrêt permettent de penser que le principe de proportionnalité prôné par une partie de la doctrine et de la jurisprudence a vécu. Si le juge constate l’existence d’une faute grave, il ne peut pas tenir compte d’un éventuel rapport entre la sanction et le préjudice qui en résulterait pour la partie ayant commis la faute.

Source: Cass. 6 juin 2016, RG S.15.0067.F, http://www.juridat.be

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