28/12/10

La Cour de Cassation précise les limites du secret médical dans le cas du patient victime

Jurisprudence – Secret médical

Dans la lignée de sa jurisprudence antérieure, la Cour de Cassation a récemment rappelé que le secret médical ne s’étendait pas aux faits dont le patient est la victime. Le raisonnement de la Cour, tel qu’il ressort de l’arrêt du 18 juin 2010, confirme que les limites du secret médical doivent être définies au regard de l’objet de cette règle, consacrée de manière générale par l’article 458 du Code pénal, à savoir la protection de la relation entre le médecin et son patient.

L’article 458 du Code pénal interdit au médecin, sauf cause de justification, de divulguer des faits couverts par le secret professionnel qui peuvent donner lieu à des poursuites pénales à charge du patient. Cette interdiction ne s’étend toutefois pas à des faits dont le patient a été la victime.

La jurisprudence de la Cour de Cassation considère en effet qu’un médecin ne viole pas son secret professionnel s’il porte à la connaissance de la justice une infraction commise par une personne qui n'a pas été reçue par lui en qualité de consultant ou de patient (Voy. Cass. 16 décembre 1992, Pas., 1992, I, p. 1390). Un médecin peut donc dénoncer le mari d’une patiente qui se serait rendu coupable de violences conjugales si ces violences lui sont rapportées par sa patiente qui en est la victime.

Dans son arrêt du 18 juin 2010, la Cour met à néant une décision du Conseil d’appel des médecins qui déclare irrecevables les poursuites pour agression sexuelles à l’encontre d’un médecin. Sanctionné disciplinairement par le Conseil de l’Ordre pour ses agissements, ce dernier avait invoqué l’irrecevabilité des poursuites contre lui au motif que ces faits avaient été dénoncés à ses autorités disciplinaires par d’autres médecins, eux-mêmes mis au courant par le psychologue de la jeune fille victime de cette agression.

Faisant droit à cet argument, le Conseil d’appel a estimé que les règles du secret professionnel faisaient obstacle à ce que les deux médecins révèlent à l’Ordre des médecins les confidences faites par leur patiente.

Sans se prononcer sur le devoir de loyauté des médecins à l’égard de leur Ordre et sur l’absence de secret professionnel à l’égard des autorités disciplinaires de l’Ordre – par ailleurs reconnue par une jurisprudence constante – la Cour de Cassation a cassé le décision du Conseil d’appel au motif que « le secret médical protège la relation de confiance entre le patient et le médecin et ne s’étend pas aux faits dont le patient aurait été victime ». Le secret médical ne peut en effet avoir pour objectif d’empêcher la répression à l’égard de l’infraction dont le patient a été victime.

Très succinct, cet arrêt laisse toutefois ouverte la question de savoir si le médecin peut dénoncer les faits dont son patient aurait été la victime aux autorités, ordinales ou judiciaires, et ce contre la volonté expresse de son patient. Contrairement à la Cour, certaines juridictions n’ont pas hésité à franchir ce pas (Voy. Corr. Ypres , Rev. dr. santé, 2004-2005, p.310, note F. BLOCKX ; « Het medisch beroepsgeheim en het opsporen van misdrijven »).

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