19/02/20

Une précision utile sur la rémunération du personnel « de direction ou de confiance »

Un travailleur considéré comme personnel de direction ou de confiance peut, dans certains cas, prétendre à une rémunération pour les heures prestées au-delà de la normale. La Cour du travail de Liège rappelle ici les conditions d’application de ce principe.

Les faits  

Une entreprise engage un travailleur, en qualité de « site engineer ». 

Le contrat de travail prévoit que le travailleur exercera des missions temporaires partout en Belgique et à l’étranger. Lors des missions à l’étranger, l’ingénieur est chargé d’assurer le contrôle du montage et de la mise en service d’équipements conçus et vendus par son employeur, dans des entreprises clientes. 

Après 5 ans de collaboration, le travailleur réclame le paiement d’arriérés de rémunération pour un certain nombre d’heures supplémentaires effectuées lors des missions à l’étranger. Suite au refus de son employeur, l’ingénieur introduit une action en justice. 

La décision de la Cour 

Personnel de direction ou de confiance 

L’article 2 de l’arrêté royal du 10 février 1965 énumère les fonctions considérées comme « postes de direction ou de confiance ». En particulier, l’article 2.6 vise « les personnes chargées de missions de contrôle ou d’inspection qui doivent être exercées, en tout ou en partie, en dehors des heures normales de travail ».

Selon la Cour, les tâches exercées par le travailleur lors de ses missions à l’étranger correspondent bien à des missions de contrôle et d’inspection.

Quant à la question de savoir si ces missions sont exercées ou non en dehors des « heures normales de travail », la Cour se réfère à la jurisprudence de la Cour de cassation. Par « heures normales », il convient d’entendre « les heures de travail habituellement prestées par les autres travailleurs de l’entreprise concernée et non les heures normales de bureau des entreprises en général ». 

En l’espèce, le règlement de travail de l’entreprise prévoit que la durée de travail est de 40 heures par semaine alors que les contrats conclus entre l’employeur et les entreprises clientes prévoient un support technique de 10 heures par jour et 6 jours par semaine. 

L’ingénieur est donc bien investi d’un poste de confiance au sein de l’entreprise, dès lors qu’il exerce des missions de contrôle, en partie en dehors des heures normales de travail.

Droit à la rémunération pour les heures prestées au-delà de l’horaire normal de travail 

La personne investie d’un poste de direction ou de confiance n’est pas soumise à la législation relative à la durée du travail. Elle n’effectue donc pas d’heures supplémentaires et ne peut prétendre à un sursalaire ni à des repos compensatoires. 

En revanche, la question de savoir si cette personne a droit à sa rémunération ordinaire pour les heures prestées au-delà de l’horaire normal de travail, est plus discutée. 

Dans son arrêt, la Cour du travail de Liège se rallie à la jurisprudence de la Cour du travail de Bruxelles et considère que le principe d’exécution de bonne foi des conventions « permet au travailleur de réclamer une indemnisation sur la base de l’article 1135 du Code civil lorsque la rémunération convenue est sans commune mesure avec ce qu’exige la fonction exercée ». 

Il faut donc avoir égard au caractère modeste ou, au contraire, suffisamment élevé de la rémunération octroyée au personnel de direction ou de confiance. 

En l’espèce, le package salarial du travailleur augmentait sensiblement lors de ses missions à l’étranger. La Cour en déduit que la rémunération octroyée couvrait bien l’ensemble des prestations effectuées. Le travailleur n’a donc droit à aucun arriéré de rémunération et est débouté de son action.

Que retenir ?

Pour déterminer si une personne investie d’un poste de direction ou de confiance a droit au paiement de sa rémunération normale pour les heures prestées au-delà de l’horaire habituel de travail, les cours et tribunaux se réfèrent à la hauteur de la rémunération perçue par ce travailleur. 

Une rémunération suffisamment élevée peut indiquer qu’une plus grande variabilité des prestations a été convenue entre les parties : dans ce cas, aucun supplément n’est dû. 

Source : C. trav. Liège (div. Liège), 25 octobre 2019, R.G. n° 2018/AL/648. 

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