05/07/19

La protection belge des témoins en cas de discrimination est insuffisante pour la Cour de justice

Dans un arrêt du 20 juin 2019 (C-404/18), la Cour de justice a jugé que les témoins de discrimination ne sont pas suffisamment protégés par la législation belge sur la discrimination. L'affaire sous-jacente concernait une gérante de magasin qui avait fait savoir à la direction que son refus d'embaucher une femme enceinte, bien qu'elle soit une candidate appropriée, était contraire aux dispositions antidiscrimination de la Loi Genre. La gérante de magasin a informé la candidate enceinte que sa candidature avait été rejetée en raison de sa grossesse et que celle-ci avait déposé une plainte auprès de l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes. Le contrat de travail du gérant du magasin a été résilié par la suite. L'affaire de la candidate et celle de la vendeuse ont été portées devant le tribunal du travail d'Anvers qui, d'une part, a statué que la candidate était effectivement victime de discrimination et, d'autre part, a dû établir que les actions de la gérante du magasin ne pouvaient se prévaloir de la protection contre les mesures de représailles de l'article 22, §9 de la Loi Genre car elle ne pouvait soumettre un document signé et daté concernant son témoignage, comme le requiert l'article 22, § 3 de la Loi Genre. Pour cette raison, le tribunal du travail a demandé à la Cour de justice si ces conditions sont conformes à la lumière de l'article 24 de la directive 2006/54 relative à l'égalité des chances et de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail.

La Cour rappelle que l'article 24 de la directive impose aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs, y compris les représentants des travailleurs, soient protégés contre tout licenciement ou autre traitement défavorable de la part de l'employeur en réponse à une plainte au sein de l'entreprise ou à toute procédure visant à garantir le respect du principe de l'égalité de traitement. En outre, la Cour observe qu'un travailleur défendant ou témoignant au nom d'une victime de discrimination devrait avoir droit à la même protection que la personne protégée, même après que la relation de travail ait pris fin. Selon la Cour, l'efficacité de la protection contre la discrimination fondée sur le sexe n'est pas assurée si cette protection ne s'étend pas aux mesures qu'un employeur peut prendre à l'encontre des employés qui, formellement ou informellement, ont défendu ou témoigné au nom de la personne protégée. Dans le cas contraire, les travailleurs, qui sont les mieux placés pour défendre les victimes, sont découragés de prendre la défense de cette personne par crainte de ne pas être protégés s'ils ne respectent pas certaines exigences formelles. Le système belge est donc trop strict et n'offre pas une protection suffisante pour être en conformité avec le droit communautaire.


Auteur : Pieter Pecinovsky

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