02/10/20

Le point de départ de la période de 7 jours ouvrables pour la résiliation d'un contrat d'agence commerciale du fait de circon…

Le point de départ du délai de 7 jours ouvrables pour la résiliation d'un contrat d'agence commerciale en raison d'une circonstance exceptionnelle ou d'un manquement grave a fait couler beaucoup d'encre ces dernières années. Cet e-zine clarifie la manière dont cette règle doit être appliquée, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de cassation la plus récente.

1. POURQUOI CHOISIR DE METTRE FIN À UN CONTRAT D’AGENCE COMMERCIALE EN RAISON D’UNE CIRCONSTANCE EXCEPTIONNELLE OU D'UN MANQUEMENT GRAVE?

Un contrat d'agence commerciale à durée indéterminée peut être résilié à tout moment par chacune des parties, sous réserve du respect d'un délai de préavis ou du paiement d'une indemnité en lieu de préavis.

En outre, la cessation du contrat d’agence commerciale donne droit à une indemnité d'éviction dans le chef de l’agent commercial lorsque ce dernier a apporté de nouveaux clients au commettant, ou a développé sensiblement les affaires avec la clientèle existante, pour autant que cette activité puisse encore procurer des avantages substantiels au commettant. 

En revanche, si le contrat d’agence commerciale est résilié en raison de circonstance exceptionnelle ou de manquement grave, il n’existe pas d’obligation de respect d’un délai de préavis ni de payement d’une indemnité en lieu de préavis. Dans un tel cas, le commettant n'est pas non plus tenu de payer une quelconque indemnité d’éviction à l’agent commercial.

Invoquer avec succès l’application des règles relatives à la résiliation pour cause de circonstance exceptionnelle ou de manquement grave (en vertu de l'article X.17 du Code de droit économique - CDE) peut donc avoir un impact financier important.

2. DÉLAI DE 7 JOURS OUVRABLES À RESPECTER

Pour pouvoir invoquer les règles susmentionnées, il est nécessaire d’établir qu'une partie a commis un manquement si grave qu'il rend définitivement impossible toute collaboration professionnelle entre le commettant et l'agent commercial. Plus précisément, ce manquement doit causer une rupture de confiance définitive et irréparable entre les deux parties. 

La partie qui souhaite résilier le contrat doit tenir compte d’un délai légal de 7 jours ouvrables pour invoquer le fait justifiant rupture.

L'article X.17 CDE stipule en effet que : « Le contrat ne peut plus être résilié sans préavis ou avant l'expiration du terme, lorsque le fait qui l'aurait justifié est connu de la partie qui l'invoque depuis sept jours ouvrables au moins ».

En outre, le second paragraphe de l'article X.17 CDE met en place une autre condition légale à respecter : la circonstance exceptionnelle ou le manquement grave doit être notifié(e) par exploit d'huissier de justice ou par lettre recommandée à la poste, expédiée dans les sept jours ouvrables qui suivent la résiliation. L’application de cette règle est toutefois généralement plus souple dans la pratique. 

Le non-respect du délai susmentionné entraîne la nullité de la résiliation, ce qui implique qu’une indemnisation sera en principe due.

3. QUAND COMMENCE LE DÉLAI DE 7 JOURS OUVRABLES?

a.    Règles générales

Le délai de 7 jours est un délai de déchéance. Si une partie met fin tardivement au contrat d'agence commerciale, elle prend donc le risque d’avoir mal évalué le délai susmentionné et de voir sa demande de résiliation du contrat sur base de ces règles frappée de nullité. Si, en revanche, une partie met fin prématurément à son contrat, elle court le risque qu’il soit considéré que les faits invoqués n’étaient pas encore suffisamment exceptionnels ou graves au moment de la demande de rupture. 

La charge de la preuve du respect de ce délai incombe à la partie qui résilie le contrat. Cette partie devra notamment établir de manière certaine le moment où elle a disposé d’une connaissance suffisante du fait qui, selon elle, constitue une circonstance exceptionnelle ou un motif grave justifiant la demande de rupture. 

b.    Arrêts de la Cour de cassation

Deux questions spécifiques se posent quant au point de départ du délai de 7 jours:

Quelle partie doit avoir connaissance du fait justifiant la résiliation, qui est « la partie qui l'invoque »? 
Quand existe-t’il une connaissance effective du fait qui constitue une circonstance exceptionnelle ou un manquement grave, quand ce fait est-il connu, et quand existe-t’il une certitude suffisante à ce sujet? 

La Cour de cassation s'est prononcée sur la première question dans son arrêt du 30 janvier 2015. La personne ou, dans le cas d'une personne morale, l'organe qui doit avoir connaissance des faits justifiant la résiliation du contrat d'agence commerciale pour motif urgente, est l'entité autorisée à résilier le contrat d'agence commerciale. 

La Cour de cassation s'est récemment prononcée sur la deuxième question dans son arrêt du 14 novembre 2019. Selon la Cour, la connaissance effective du fait est établie au moment où la partie résiliant le contrat a une certitude suffisante quant à l'existence du fait et aux circonstances qui font de ce fait un motif de résiliation sans préavis, lui permettant de prendre une décision en toute connaissance de cause au vu de ses propres convictions, ainsi qu’à l’égard des autres parties et de la juridiction saisie. Est seul déterminant le moment où la partie résiliant le contrat prend effectivement connaissance de l’existence et de la gravité des faits qu’elle invoque, et non le moment où cette partie aurait pu en prendre connaissance.

Cette jurisprudence introduit donc un certain critère du « raisonnable » dans l'évaluation du point de départ du délai de 7 jours. Il en reste que la partie résiliant le contrat devra faire attention à accomplir les mesures requises au bon moment, dans le respect des formalités requises. 

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