09/03/16

Règlement en ligne des litiges de consommation (‘RLL’)* : qu’est-ce qui change pour mes activités de commerce en ligne ?

Le Règlement 524/2013 du Parlement européen et du Conseil relatif au règlement en ligne des litiges de consommation est entré en vigueur ce 9 janvier 2016. Le Règlement marque un pas supplémentaire dans l’harmonisation de la dimension numérique du marché intérieur et lance une nouvelle voie pour le règlement extra-judiciaire des litiges nés à l’occasion de transactions en ligne.

Qui peut faire appel au RLL ?

Tant les consommateurs que les entreprises actives dans l’e-commerce peuvent lancer une procédure de RLL. Il peut être fait appel à celle-ci pour toutes les contestations découlant de contrats de vente ou de service conclus sur internet entre un consommateur résidant dans un Etat membre de l’Union européenne et une entreprise qui y est établie. La procédure s’applique donc également aux litiges purement « nationaux ». Elle n’est par contre pas applicable aux litiges qui surgissent à l’occasion de transactions hors ligne, ni davantage aux litiges entre entreprises (« B2B »).

Comment se déroule la procédure?

La plateforme de RLL est active et accessible sur le site de la Commission européenne depuis le 15 février 2016 (http://ec.europa.eu/consumers/odr/). Le plaignant peut remplir le formulaire de plainte en ligne sur cette page. La plateforme de RLL transmet la plainte à l’entité de REL* (“Règlement Extrajudiciaire des Litiges”) compétente (en Belgique, le Service de Médiation pour le Consommateur, l'Ombudsman en conflits financiers ou l’Ombudsman des Assurances) et en informe l’autre partie. Lorsque la plainte est formée contre une entreprise, cette dernière doit préciser dans les 10 jours calendrier si elle est tenue, par une disposition légale ou réglementaire, de faire appel à une entité de REL déterminée pour régler ses litiges avec les consommateurs et, dans le cas contraire, si elle est disposée à faire appel à l’une des entités de REL proposée par la plateforme de RLL. La plateforme de RLL informe le plaignant de la réponse du défendeur, en suite de quoi les parties disposent d’un délai de 10 jours calendrier pour se mettre d’accord sur le choix de l’entité de REL.

Si les parties ne parviennent pas à convenir d’une entité de REL  endéans les 30 jours de l’introduction du formulaire de plainte (ou si l’entité de REL choisie refuse de traiter la plainte), la procédure est abandonnée. Le plaignant est alors informé qu'il peut se mettre en rapport avec un conseiller pour le RLL afin d'obtenir des informations générales sur d'autres recours juridiques pouvant être mis en œuvre.

Si la plainte est envoyée devant une entité de REL, qui accepte de la traiter, une décision – contraignante ou non selon le cas – sera rendue, en principe dans un délai de 90 jours calendrier. Ce délai, éventuellement prolongeable pour des litiges complexes, se calcule à dater du jour où l’entité de REL est entrée en possession de l’entièreté du dossier. Les parties ne sont en principe pas tenues de comparaitre devant l’entité de REL, la procédure pouvant être entièrement diligentée en ligne via la plateforme de RLL.

Quelles obligations pour l’entreprise qui fait du commerce en ligne ?

Le Règlement oblige toute entreprise établie dans l’Union européenne qui vend ou preste des services en ligne, ainsi que toutes les « places de marché en ligne » établies dans l’Union, à faire apparaitre un lien « facilement accessible » vers la plateforme de RLL, sur leur site web ou, si l’offre est faite par email, dans cet email. Le vendeur ou prestataire de services est également tenu d’indiquer une adresse email.

De plus, une entreprise qui s’est engagée à faire appel aux services d’une entité de REL en vue de régler ses litiges avec les consommateurs, ou qui doit le faire en vertu d’une disposition légale ou réglementaire, est également tenue de faire figurer dans sesConditions générales toutes les informations utiles relatives à la plateforme de RLL.

Quelques réflexions complémentaires...

Le Règlement ne précise pas à quelle étape du processus de vente en ligne doivent être communiquées au consommateur les informations relatives aux RLL. Il prévoit uniquement que le lien électronique doit être “facilement accessible”. Il nous semble douteux que cette exigence soit satisfaite lorsque le lien est repris dans les conditions générales d’un site web et non sur la page de commande des produits ou services et/ou lors de la confirmation de la commande.

En outre, il n’est pas évident de déterminer, en tout cas lorsqu’il s’agit d’une entreprise, si le défendeur a le droit de refuser letraitement de la plainte par une entité de REL. Le Règlement suggère une réponse affirmative. En effet, l’entreprise contre laquelle une plainte a été introduite doit uniquement répondre « si elle est prête à faire appel aux/à l’une des entité(s) de REL compétente(s)”. En outre, le Règlement prévoit que si les parties ne se mettent pas d’accord sur l’entité de REL qui réglera leur différend dans les 30 jours calendrier suivant l’introduction de la plainte, la procédure est abandonnée et le plaignant devra s’orienter vers d'autres modes de règlement de son litige. Il est toutefois permis de se demander comment ces indications peuvent être réconciliées avec les dispositions particulières, de droit belge, qui institutionnalisent la possibilité de saisir un Ombudsman dans le secteur de la banque et celui des assurances (quand bien même les avis de celui-ci n’ont pas un caractère contraignant).

Enfin, le Règlement ne fait pas obstacle à ce que les parties portent le litige devant les tribunaux si elles ne sont pas d’accord avec la décision prise par l’entité de REL. Contrairement à ce qui est prévu en matière d’arbitrage, où le juge ne dispose que d’une compétence (très) limitée pour réviser une sentence, le juge jouira ici, vraisemblablement, d’un pouvoir de pleine juridiction.

* Les RLL et REL sont également parfois désignés sous leur noms anglais respectifs  « ODR » (Online Dispute Resolution) et « ADR » (Alternative Dispute Resolution).

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