04/09/10

Enregistrements abusifs de noms de domaine : la Cour de Justice précise la notion de mauvaise foi

Dans un arrêt Internetportal und Marketing du 3 juin 2010, la Cour de Justice de l´Union euro-péenne clarifie la notion de mauvaise foi en matière d´enregistrements abusif de noms de do-maine.

La première précision utile apportée par la Cour concerne la détermination des éléments suscep-tibles d´être pris en compte pour prouver qu´un enregistrement de nom de domaine a été effectué de mauvaise foi.

La Cour indique que l´énumération de circonstances figurant dans le règlement sur le domaine « .eu » (règlement 874/2004, article 21) ne peut être qu´exemplative. La mauvaise foi peut donc être démontrée sur la base de toutes circonstances de faits propres à chaque cas d´espèce, sans qu´il faille nécessairement se référer à l´une des hypothèses visées dans le règlement.

La Cour aborde ensuite le cas particulier qui lui était soumis.

Afin de lutter préventivement contre les enregistrements abusifs, le règlement 874/2004 pré-voyait un mécanisme d´enregistrement des noms de domaine « .eu » par étapes :

- Jusqu´en avril 2006 (« sunrise period »), seuls les titulaires de droits antérieurs pouvaient enregistrer les noms de domaine ;

- Depuis lors, le domaine « .eu » est ouvert au public sans restriction.

Il fallait donc être titulaire de droits particuliers sur un signe pour pouvoir bénéficier de la priorité d´enregistrement. Et cette priorité permettait uniquement d´enregistrer le nom de domaine « .eu » correspondant exactement au signe sur lequel on a des droits. Une exception à cette limite : si le signe protégé comporte des caractères « spéciaux », tels que « & », alors le nom de domaine que l´on peut enregistrer est le signe protégé dépourvu desdits caractères spéciaux.

La société Internetportal und Marketing a tenté de profiter de la période de priorité pour en-registrer des noms de domaine correspondant à des termes génériques de la langue alle-mande. Elle a enregistré une série de marques dont les lettres étaient séparées par des carac-tères spéciaux. Ainsi, le mot « REIFEN », signifiant pneus a été enregistré comme marque sous la forme « &R&E&I&F&E&N& ». Sur cette base, il était possible de bénéficier de la priorité pour l´enregistrement du nom de domaine « reifen.eu ».

Pour la Cour, il y a eu tentative délibérée de contourner le mécanisme de l´enregistrement par phases mis en place par le législateur européen. Elle se fonde sur les éléments suivants:
- la volonté manifeste de camoufler un terme générique par l´usage systématique de caractères spéciaux (point 50) ;
- le caractère répétitif de ces manoeuvres (point 51) ;
- les marques ont été enregistrées peu avant l´ouverture de la période sunrise (point 52).

La Cour conclut donc à la mauvaise foi du demandeur de noms de domaine.

L´arrêt peut être consulté sur le site web officiel de la Cour, à l´adresse
http://curia.europa.eu (affaire C-569/08).

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