07/01/14

Le permis d'environnement unique en région flamande, bientôt une réalité

Tant pour les investisseurs publics que privés, il est devenu de plus en plus difficile de réaliser un important projet d’investissement endéans un délai raisonnable. Et plus particulièrement pour les projets mixtes où l’obtention d’un permis d’environnement et un permis de construire est obligatoire. En effet, ceux-ci requièrent de nombreuses démarches où le temps d’attente est généralement très long. La réception de chaque permis n’est pas concomitante et entraine une attente fastidieuse entre la réception des deux permis.

Des procédures d’autorisation rapides et simples sont indispensables pour les entreprises qui souhaitent investir et être opérationnel en Flandre. Il ne s’agit pas seulement d’entreprises, mais aussi de citoyens et d’autorités qui doivent diligenter de telles procédures. Bien qu’une procédure d’autorisation similaire existe en Wallonie et chez nos voisins du Nord, l’exaspération du monde des affaires semble toucher à sa fin.

Sur proposition des Ministres Flamands de l’environnement et de l’aménagement du territoire, Joke Schauvlieghe et Phillipe Muyters, le Gouvernement Flamand a approuvé le projet de Décret Environnement en date du 19 Avril et du 19 Juillet 2013. Ceci constitue la suite logique de la note du 22 Juillet 2011 relative à l'introduction du permis d’environnement unique. Ce décret doit donc être considéré comme la plus grande innovation de notre politique d’autorisation environnementale depuis 1991. Le Gouvernement Flamand a déjà annoncé que le décret verrait le jour avant la fin de l’actuelle législature.

L'introduction du permis d'environnement a pour but de fusionner les procédures du permis d'environnement (ou notification) et du permis d'urbanisme (ou notification) en un seul permis. Le projet de décret a aussi pour but d'offrir la possibilité de rendre le melting-pot des différentes procédures actuelles plus simple et plus transparent, et ce, avec une attention spécifiquement dédiée à la participation du public. Il y aura donc une seule autorisation, un seul avis et une seule décision.

Depuis le 1er janvier 2010, il existait déjà en Flandre un processus unique de permis pour les activités de classe 2. Avec le décret, ce processus unique d’autorisation sera étendu aux activités de classe 1. Cela implique que la liste "VLAREM" devra être l'objet d'une révision, causant un grand déclassement d'un grand nombre d'établissements, qui tomberont dès lors sous le domaine de compétence des communes.

1.    Lignes de force du (projet de) décret

1.1 Le permis d’environnement unique permet des gains de temps considérables, un examen complet et intégré et empêche des décisions contradictoires

Le projet en soi vise à créer un cadre procédural en vue d’une seule procédure de permis d’environnement où tant l’aspect urbanistique qu’environnemental du projet envisagé seront appréciés suivant une seule procédure.

L’objectif est que le demandeur soit en mesure de soumettre sa requête à une seule autorité, après quoi une seule enquête publique et une seule procédure d’avis seront organisées. Dans certains cas, l’avis de la Commission de l'environnement sera obligatoire. Il en résulte donc une seule procédure de permis, un seul examen et une seule autorisation tant pour les aspects urbanistiques qu’environnementaux d'un projet envisagé.

La procédure de permis unique crée une délivrance de permis plus efficace, accompagnée d'un maximum de synergies à travers les différentes étapes. Cette procédure sera plus facile d'utilisation,  avec un résultat plus rapide et d'une meilleure qualité que le système actuel de procédures distinctes de permis.

Les procédures d'autorisation existantes pour les opérations d'urbanisme, les lotissements, et pour l'exploitation des établissements classés, en application du Codex Flamant de l’aménagement du territoire (VCRO) et du Décret d'Environnement, seront intégrées dans le décret d'environnement. En outre, le décret intègre dans la nouvelle procédure de permis, le rapport sur l'impact environnemental et le rapport sur la sécurité de l'environnement.

L'intégration des procédures permettra aux entrepreneurs d'obtenir une seule autorisation donnant autant accès à l’exécution d'une action urbanistique qu'à l'exploitation d'une activité incommode, et cela suite à une seule demande de permis, une seule enquête publique et un seul processus d’avis. 

L’abandon des différentes procédures permettra d'économiser des gains de  temps substantiels pour la réalisation de projets complexes. En outre, des délais de procédures limités seront introduits pour assurer un gain de temps. Les décrets existants (VCRO et permis d'environnement) ne prévoient pas  toujours une sanction pour le dépassement des délais de procédure, ce qui sera le cas ici. Ainsi, le défaut d’avis en temps opportun sera sanctionné par le biais d'un avis favorable. Une comparaison avec d'autres pays démontre que la Flandre, via son décret, améliore de manière significative son « time-to-permit », à savoir la période s’étendant entre la demande et la décision finale.

Un permis d’environnement unique comprend une appréciation complète tant de l’aspect urbanistique que de l’aspect environnemental en lien avec la réalisation du projet. Des aspects ayant des contenus annexes seront traités de façon plus efficace, ce qui mènera à de meilleures décisions du point de vue qualitatif pour l’entrepreneur-demandeur. De cette manière, des décisions contradictoires seront évitées.

En outre, la procédure de permis unique mettra finalement un terme aux problèmes juridiques qui se font suite à la connexion entre le permis d'urbanisme et le permis d’environnement (art. 4.5.1. VCRO en art. 5 § 1 décret permis d’environnement), ayant comme conséquence que l’exécution des deux permis est dépendante l'un de l'autre.

1.2 La limitation des procédures et les permis coordonnés

Le Décret concernant le permis d’environnement réduit le nombre de permis à deux, à l’opposé de la VCRO, le décret du permis d'environnement et VLAREM (règlement relatif au permis d’environnement) qui requièrent une autorisation basée sur de multiples procédures.

Ainsi, deux procédures sont introduites, qui contribuent à accroître la transparence de la réglementation :

- Une procédure simple dans laquelle est menée une enquête publique, avec une période de décision de 105 jours;
- Une procédure simplifiée (sans enquête publique) permettant une décision dans les 60 jours.

Le décret comprend également une procédure de notification pour les simples projets pour lesquelles seule une obligation de notification est requise.

Le décret met en œuvre le permis d’environnement unique pour les activités ou établissements classés. En conséquence, le bénéficiaire du permis, ne dispose que d’un seul permis permettant l’exploitation d’activités ou d'établissements classés.

1.3 Le permis d'environnement à durée indéterminée constitue un avantage économique et offre une plus grande sécurité juridique

Le permis environnemental sera accordé pour une durée indéterminée (c.-à-d. de manière permanente). Cependant, le décret énumère de manière exhaustive les cas où il ne sera accordé que temporairement. Cette introduction d'un permis permanent aura comme conséquence que le coût pour la constitution et le dépôt d’une requête de permis à durée illimitée, qui pourrait facilement dépasser les 4.000,00 €, pourra être épargné.

Grâce à la durée illimitée du permis environnemental, le titulaire du permis ou l'exploitant ne devra plus prendre compte de l’expiration de son permis lorsqu’il souhaitera procéder à des investissements dans son entreprise.

Le projet de décret prévoit un régime transitoire qui dispose que les permis d'environnement qui ont été émis depuis le 10 septembre 2002, pour une période de 20 ans, sont réputés être accordés pour une durée indéterminée.

1.4 Des garanties octroyées pour la protection humaine et de l'environnement et la participation des citoyens au travers de mesures d'accompagnement.

L’introduction d’un permis d’environnement permanent par la suppression de la procédure de renouvellement du permis ne signifie pas qu’il y a atteinte à la protection de l'homme et de l’environnement. Aussi la participation du public est garantie. Pour ce faire, il a été prévu que l'introduction d’un permis permanent sera accompagnée par un certain nombre de prétendues "mesures d'accompagnement".

Le projet de décret prévoit plusieurs évaluations dont les installations classées feront l'objet :
(i) des évaluations spécifiques : afin d'améliorer les meilleures techniques disponibles (« MTD ») ;
(ii) l’évaluation intégrale périodique : pour les établissements  ayant des installations GPBV (réputées incommodes) qui tombent sous le champ d'application de la directive européenne relative aux émissions industrielles (directive IED - 2010/75/UE) ;
(iii) une possibilité de consultation du public concerné, à la fin de chaque période de fonctionnement de 20 ans, où le public en question ou l’autorité administrative compétente auront l’occasion de formuler des remarques sur la poursuite de l’exploitation de l’établissement classé ou de son activité. Dans ce cas, une procédure sera engagée devant l'autorité compétente pour la prolongation du permis, qui pourrait conduire à des changements de conditions environnementales, à la réduction de l'objet ou de la durée de l'exploitation, ce qui veut dire que le permis d'environnement pourra être ajusté au cours de sa durée.

1.5 La consultation préalable, la boucle administrative et la procédure qualitative de l'octroi d'un permis d'environnement 

Le décret permet une concertation préalable facultative entre l'initiateur et le gouvernement concerné, sur le projet envisagé avant le début de la procédure de permis d’environnement. Ceci est particulièrement important pour la faisabilité du projet. L'initiateur d'une demande de permis sera dès lors en mesure d'ajuster lui-même les conditions du permis en fonction des réglementations en vigueur.

Il y a également la boucle administrative qui sera introduite. Le requérant d'un permis sera autorisé à apporter des modifications à sa demande de permis, avec l'accord de l’autorité compétente en charge de l’octroi de permis, après l'enquête publique ou pendant une procédure de recours administratif. Au cas où une nouvelle enquête publique a lieu, le délai de décision est automatiquement prolongé. Cette boucle administrative évite qu'une nouvelle demande soit nécessaire.

En outre, des comités environnementaux seront mis en place en vue de conseiller les autorités régionales et provinciales lors de projets complexes et de grande envergure. Ce modus operandi contribuera à améliorer les processus d’octroi de permis. Sa mise en œuvre reste toutefois encore à déterminer par arrêté du Gouvernement Flamand.

2.    Conclusion

L’obtention rapide et réussie d’un permis d'urbanisme et d'environnement est depuis des années une question épineuse pour les entreprises flamandes et étrangères. Les procédures que le demandeur d'un permis doit diligenter auprès de plusieurs organismes gouvernementaux sont complexes et génèrent des décisions trop souvent contradictoires. D’autre part, dans le système préexistant un permis d'environnement ne peut être obtenu que pour une période maximale de 20 ans, alors que des permis similaires sans durée de temps étaient déjà délivrés par nos pays voisins. Le permis d’environnement unique constitue dans ce contexte, un soulagement pour de nombreuses entreprises.

Par l’introduction d’une seule procédure, d’un seul avis et d’une seule décision pour l’octroi d’un permis de construction et d’environnement, la transparence et la simplicité seront non seulement de mise pour les parties concernées mais permettront également d’assurer la sécurité juridique pour tout demandeur de permis.

Le nouveau système de permis d'environnement permet un changement majeur dans l'ampleur et la nature des fonctions des autorités publiques et ce, à différents niveaux. L'organisation et la capacité administrative constituent donc un facteur crucial pour le succès de toute cette opération. 

D’autre part, le gouvernement flamand a décidé de transférer la compétence relative au contentieux de suspension et d’annulation au Conseil pour les contestations d'autorisations. Ainsi de suite pour le contentieux environnemental. Cela implique un élargissement considérable des compétences du Conseil pour les contestations d'autorisations.
Cette élargissement de compétence risque, dans un futur proche, de soulever une nouvelle problématique relative au fait que le Conseil pour les contestations d'autorisations est aujourd'hui déjà surchargé et dépassé par un arriéré de plus en plus grandissant. Ainsi, il n’est pas (non plus) capable de gérer les recours endéans un "délai raisonnable".

Cela pose un problème particulier pour les recours intentés avant le 1er septembre 2011 dont certains sont actuellement en cours de traitement depuis plus de 3 ans ! Entre-temps, des mesures d’ordre intérieur ont été adoptées par le Gouvernement en vue de résorber le retard du Conseil, mais malheureusement ceci n’est pas suffisant. Les principales organisations et conseils consultatifs plaident pour la fusion de la Cour environnementale de la région flamande et le Conseil pour les contestations d'autorisations en vue d’obtenir une seule Cour qui sera investie de la compétence en matière de recours relatifs aux permis et ce, en vue d’un traitement efficace. Toutefois, sans réelle mise en œuvre par des arrêtés d’exécution, il sera difficile d’estimer la portée de ces nouveaux changements.

Tout dépendra de la mise en œuvre par le biais des arrêtés d’exécution adoptés par le Gouvernement Flamand. Le décret devrait en principe entrer en vigueur en 2014, mais on peut déjà raisonnablement estimer que le décret ne fera son apparition qu’après le mois de juin 2015.
Malgré la célérité du permis d’environnement unique durant la phase administrative, une procédure de suspension et/ou d'annulation pourra constituer une pierre d'achoppement pour l'acquisition définitive du permis. La façon dont le Conseil pour les contestations d'autorisations abordera ces changements est sujette à spéculation.

Vu que le projet a été approuvé par deux fois par le Gouvernement flamand, la mise en œuvre effective du décret dépendra de l’adoption d’arrêtés d’exécution par le Gouvernement flamand qui donnera naissance de façon définitive à ce décret. 

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