03/10/14

La peine de mort pour les malades mentaux ?

Le 10 octobre 2014 sera la 12e journée internationale contre la peine de mort.

C'est le moment de rappeler que, durant ce mois de septembre 2014, au moins trois avocats ont été assassinés : Roberto Felicio aux Philippines, Cipriano Puertas Rubio au Mexique et, abomination des abominations, Salema Saleh al-Naïmi en Irak, enlevée, torturée, jugée sommairement et exécutée par DAESH.

Sagesse n'est pas folie. Mais ici, c'est vraiment de barbarie qu'il est question. Nous voici renvoyés aux pires heures de l'humanité, aux temps de l'inquisition et des génocides.

Que ces quelques lignes soient un nouvel hommage à ces avocats qui ont payé de leur vie leur engagement pour que leurs semblables aient une vie meilleure, conforme aux droits de l'homme et à la dignité.

Le thème général de la journée du 10 octobre 2014 est la protection des malades mentaux : soignez-les, ne les exécutez pas.

La coalition mondiale pour l'abolition de la peine de mort, dont AVOCATS.BE est membre, n'imaginait pas, lorsqu'elle l'a choisi, quelle brûlante actualité il revêtirait dans notre pays, en Belgique, ici.

La Belgique ne cesse d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme pour la façon dont elle traite les malades mentaux emprisonnés. Notre absence de réaction face à ces multiples rappels à l'ordre et à la dignité devient insupportable.

Et voici qu'un détenu, interné en 1982 après avoir commis des infractions extrêmement graves (des viols et agressions sexuelles puis, sept ans plus tard, lors d'une tentative de remise en liberté, le viol et le meurtre d'une jeune femme de dix-neuf ans), abandonné à lui-même sans presqu'aucun soin, après s'être vu refuser un transfert vers un établissement psychiatrique néerlandais où il aurait pu recevoir les soins dont il a besoin (parce qu'aucun cadre légal n'autoriserait pareil transfert...), conscient qu'il restera interné à vie et, d'ailleurs, que s'il était remis en liberté il récidiverait puisque rien n'est entrepris pour qu'il puisse maîtriser ses pulsions, sollicite l'euthanasie.

Et voici que trois médecins constatent qu'il souffre d'une maladie irréversible, invalidante et douloureuse qui l'empêche d'avoir une vie digne d'être vécue et, dès lors, accèdent à sa demande.

Et voici que la Cour d'appel de Bruxelles en prend acte.

Et voici que quinze autres détenus, dans des circonstances plus ou moins analogues, sollicitent également le droit à l'euthanasie.

Honte sur nos gouvernants. Honte sur notre administration. Honte sur la Belgique. Honte sur nous.

Si Frank Van Den Bleeken, aujourd'hui âgé de 52 ans, interné depuis 32 ans dans l'annexe psychiatrique d'une prison (aujourd'hui Merksplas), est en situation, selon ses médecins, de solliciter sa mise à mort, c'est parce que l'État, malgré les multiples condamnations dont il a été l'objet, notamment sur la base de l'article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, manque à ses devoirs.

La Belgique inflige, fût-ce par imprévoyance, des traitements inhumains et dégradants à cette catégorie particulièrement vulnérable de détenus que sont les aliénés et, au bout du compte, les contraint à solliciter eux-mêmes la mort.

La condamnation à la torture sans peine de torture. La condamnation à mort sans peine de mort.

Quelle indignité !

Et demain, accepterons-nous que des personnes handicapées, des personnes âgées, des personnes sans ressource, demandent la mort parce que nous sommes incapables de leur assurer les conditions d'une vie digne ?

Ces lignes sont un appel à nos gouvernants, les actuels et ceux de demain.

La Belgique ne peut être pionnière dans le domaine de l'eugénisme.

Stop ! Arrêtez cela ! Arrêtons cela !

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